Portraits
Fredz à l’Olympia : « Le défi, c’est de rester soi-même tout en se réinventant »
Le 22 octobre, Fredz foulait pour la première fois la scène mythique de l’Olympia. Une date symbolique pour le jeune artiste québécois, qui clôturait ainsi une tournée intense. Porté par son nouvel album On s’enverra des fleurs, l’auteur-compositeur s’impose comme une plume générationnelle. Entre introspection, amour et espoir, Fredz livre un projet personnel, façonné à la croisée de plusieurs cultures. Quelques heures avant son concert parisien, il s’est confié sur son parcours, sa vision et la suite d’une aventure qui ne fait que commencer.
Epic Magazine France : Ce soir tu joues à l’Olympia, dernière date de ta tournée… Comment tu te sens ? Tu réalises un peu ce qui t’arrive ?
Fredz : Je ne suis jamais allé ici, et pourtant je sens l’énergie du lieu. C’est la première fois pour moi, mais je ressens vraiment l’histoire derrière cette salle. Et je suis trop content, en fait. Je suis reconnaissant de tout le chemin parcouru. On a fait la Boule Noire, la Maroquinerie, la Cigale… et nous voilà. C’est un travail d’équipe dont je suis très reconnaissant.
Epic Magazine France : Depuis tes débuts sur YouTube à 15 ans jusqu’à cette salle mythique, qu’est-ce qui a le plus changé chez toi ? Et qu’est-ce qui est resté pareil ?
Fredz : Je pense que le défi, c’est de rester soi-même et de se réinventer tout en gardant une formule qui fonctionne. J’écris et je compose toujours dans ma chambre, sur le même micro à 100 $. L’essence est la même.
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Epic Magazine France : Ton nouvel album s’appelle On s’enverra des fleurs. Pourquoi ce titre ? C’est un hommage à qui ou à quoi ?
Fredz : Le titre de l’album est un hommage aux relations terminées qui continuent de perdurer dans les cœurs. Pour moi, c’est : « on n’est plus ensemble, mais on va quand même penser à l’autre et on va s’envoyer des fleurs ». C’est « l’après-relation”, le moment où la vie reprend.
«Le défi, c’est de rester soi-même tout en se réinventant.»
Tu parles beaucoup d’amour dans tes textes, est-ce que tu parles toujours de la même personne ou tu t’adresses à une sorte d’avatar ?
Fredz : J’ai connu une grosse séparation qui m’a marqué. Aujourd’hui ça va bien, mais c’est peut-être cette personne qui devient un avatar avec le temps, finalement.
Tu as bossé l’album entre le Québec, la France et l’Espagne. Est-ce que le fait d’avoir délocalisé la production à plusieurs endroits a façonné le son de l’album ?
Fredz : À 100 % ! Par exemple, le fait d’avoir été en Espagne a beaucoup influencé le son de certaines guitares, qui sonnent beaucoup plus flamenco et qui n’auraient jamais vu le jour si nous n’y étions pas allés. Concernant la France, il y a des chansons comme « Vie de rêve » ou des morceaux typés mélodie française. Mais c’est cet ensemble de destinations qui donne sa couleur à l’album.
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Tu dirais quoi au mini Fredz de 15 ans si tu avais cinq minutes à partager avec lui ?
Fredz : Je lui dirais de ne pas lâcher, de continuer à être lui-même. De ne pas avoir peur et de faire ce qu’il a envie de faire, de ne pas trop écouter les gens.
Parce que quand tu es Québécois et que tu essayes d’exporter ta musique dans d’autres pays, plein de gens te diront que ça ne fonctionne pas comme ça. Mais ça m’a poussé à faire mon bout de chemin comme je l’entendais.
Tu fais partie d’une génération qui doute beaucoup, qui parle de santé mentale, de solitude… C’est important pour toi d’aborder ça dans ta musique ?
Fredz : Oui complètement, parce que ce sont les problématiques de ma génération que je chante. L’anxiété, la santé mentale… On est 70 % à en faire, donc à un moment, parlons-en, parce que ça fait du bien.

On sent que tu gardes un pied dans le “homemade” malgré le succès. Tu arrives encore à créer de manière instinctive ou tu travailles sur la durée ?
Fredz : Ça me prend du temps, c’est assez variable. Ça peut aller d’une journée à six mois, parce que chaque chanson est unique. Concernant mon processus, je suis du genre à trouver un mot qui va diriger tout le reste de la chanson, quitte à buter là-dessus pendant des jours.
Concernant ton processus de création, tu as un process établi ou tu n’as pas de règles ?
Fredz : Je commence souvent par la musique en elle-même. Ensuite, je trouve un mot qui va m’inspirer pour le reste de la chanson, et tout découle naturellement. Le mot en question doit être très mélodique, et c’est souvent un mot qu’on retrouve dans le refrain. C’est lui qui va définir les fondations de la maison.
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L’album est déjà bien accueilli, les salles sont pleines… Comment tu envisages la suite ? Bientôt une tournée des Zénith ?
Fredz : Bien sûr, j’adorerais ça ! Le temps nous le dira, mais si je peux toucher davantage de personnes, c’est l’idéal. Actuellement, je suis déjà tellement heureux d’avoir fait cette tournée, d’avoir voyagé en tour bus et d’avoir rempli tant de dates complètes… Si demain ça s’arrête, je serai déjà très content de l’avoir vécu.
«L’Espagne, la France, le Québec… chaque endroit a laissé sa trace sur l’album.»
Et après cette tournée, c’est quoi la suite ? Tu prends une pause ou tu es déjà en train de plancher sur la suite ?
Fredz : On est déjà en train de penser à la suite. Je n’ai jamais laissé de pause entre les projets. Sûrement que j’en prendrai une un jour, mais pour l’instant je suis encore chaud ! (rires)

Un rituel avant de monter sur scène ? Un truc que tu fais toujours, même ce soir ?
Fredz : Oui, j’ai carrément un rituel. Je fais de la méditation et des pompes pour me mettre dans le bain. On prend aussi du temps avec l’équipe pour se motiver mutuellement avant de monter sur scène, et ensuite on y va !
Quel est ton premier souvenir musical ?
Fredz : On était en 2013, j’avais 11 ans. Pour moi, c’est Stromae avec l’album Racine Carrée. Il passait en boucle dans la voiture de mes parents et à la maison. Cet album m’a beaucoup inspiré et a beaucoup influencé mon écriture jusqu’à aujourd’hui.
J’adore le contraste entre les textes, souvent tristes, et les prods très dansantes. Quelle claque ! J’aime aussi beaucoup les artistes qui écrivent fort, comme Orelsan, Nekfeu, et au Québec des artistes comme Pierre Lapointe, Loud ou Joey Bada$$.
Que dirais-tu à nos lecteurs qui ne te connaissent peut-être pas encore, pour les inviter à aller écouter ton dernier album ?
Fredz : Je leur dirais que c’est mon projet le plus proche de moi, celui qui me représente le mieux. Je pense que cet album réunit beaucoup de gens parce que les textes sont fédérateurs et que les auditeurs peuvent s’y identifier. Je suis très content de l’avoir fait.
Nouvel album « On s’enverra des fleurs » disponible
Propos recueillis par Guillaume Rospars pour Epic Magazine France le 22 octobre 2025
